Le phare d'une voiture m'aveugla un court instant. J'entendis les rires et les cris émanant du bar en face de moi. La rue était presque déserte, dans tout les cas elle était plus sombre que jamais, seul un lampadaire éclairait la ruelle aidant alors la lune haut perchée dans le ciel qui formait un cercle presque parfait. Que faisais-je là déjà ? Je ne m'en souvenais plus. La dernière chose dont je me rappelais c'est avoir été à l’association, et être parti en dernier. C'était la chose qui me tenait le plus à coeur en ce moment, d'aider les autres comme on essayait de m'aider moi, même si ce détail, personne ou du moins personne à l'association ne le savait. J'avais toujours eu en moi ce sentiment profond mais bel et bien réel de devoir aider mon prochain. Si la vie ne permettait pas qu'on vienne en aide à des personnes qui en avaient vraiment besoin, de faire le bonheur d'autrui rien que par l'écoute et la compréhension, sans jugement, alors pour moi la vie ne méritait pas la peine d'être vécu. J'avais passé une grande partie de ma vie à m'occuper des autres plus que de moi, et aujourd'hui je payais le prix de n'avoir pas su remarquer que moi aussi, j'avais des problèmes, que moi aussi, j'avais mal. Soufflant, je tremblais comme une feuille, ne sachant que faire. Mon regard s'était posé sur le Kelly's il y a peu de temps, ou peut-être beaucoup, je n'avais dès alors plus conscience du temps. Je n'avais qu'une seule envie : y pénétrer et boire. Un verre, un seul, cela ne pourrait pas me faire de mal, pas vrai ? Sortant un portable de ma poche, je composais sans attendre le numéro de mon amie la plus proche, la plus importante, qui pourtant ne me connaissait pas. "Mia ? (...) Je suis devant le Kelly's, tu pourrais, uh, venir me rejoindre ? (...) J-J'ai vraiment besoin de toi." Je raccrochais alors sans attendre, regrettant d'ors et déjà de l'avoir appelé. Elle me prenait pour quelqu'un de bien, pour la personne qui avait risqué sa vie pour sauver la sienne, et maintenant elle allait savoir que je n'étais au fond qu'un alcoolique de plus dans cette ville. Pourtant j'en avais besoin, de lui parler, de lui dire ce que j'avais sur le coeur. J'avais besoin qu'elle me connaisse réellement, de savoir si elle pouvait aussi aimer l'homme que j'étais, et non celui que je m'obstinais à montrer. "Et merde." Grommelais-je alors, resserrant ma veste contre moi, croisant les bras. J'étais à deux doigts de craquer et d'entrer, la seule chose qui me retenait désormais, était que Mia n'allait pas tarder à venir me rejoindre.

Me reposant sur le capot de ma voiture, je laissais vibrer le téléphone dans ma poche, ignorant alors un appel qui ne pouvait être que celui de Mia. Je n'avais pas le courage de décrocher. Elle devait certainement être morte de peur, j'avais raccroché si rapidement après tout, sans même lui laisser le temps de placer un mot, de poser une question. Que s'était-il passé dans ma tête au moment où j'avais décidé de l'appeler pour lui demander de l'aide, pour lui demander de venir me rejoindre, comme ça en pleine nuit. J'étais plus vulnérable que jamais, plus faible et mal en point que je ne pouvais être devant Mia. Avais-je réellement le droit de ma plaindre, moi, qui avait causé son accident ? Avais-je le droit de la faire venir au milieu de la nuit pour me venir en aide alors que j'avais failli causé sa mort ? Je n'étais qu'un égoïste, je n'avais rien appris, rien retenu de toutes mes erreurs passées, et dieu seul sait combien elles pouvaient être nombreuses. Qu'allais-je bien pouvoir dire à Mia à son arrivé ? Que tout ceci n'était qu'une blague, ou bien que j'étais un ancien alcoolique, et que j'étais le pauvre type qui avait causé son accident ? Sans plus pouvoir réfléchir, je sentis mes jambes faiblir. J'entendis alors une voix, pas n'importe laquelle, au contraire, celle de la seule personne qui pouvait bien me calmer et m'aider dans un temps présent. Je me tournais, et vis la silhouette longiligne de ma meilleure amie arriver en courant. Totalement paniquée, telle une furie, elle commença par rouspéter après moi et mon incapacité à répondre au téléphone. Elle se stoppa alors, et s'excusa. Je me sentis tout un coup d'autant plus mal de lui avoir causé tant de tort. Je me redressais, me positionnant face à elle avant de venir la prendre dans mes bras. "Merci." Chuchotais-je alors au creux de son oreille, comme si ce geste d'amitié allait tout régler, comme si elle allait oublier que je l'avais appeler pour lui demander son aide. Je sentis alors qu'elle avait la chair de poule, et me détachant d'elle je pus m’apercevoir qu'elle n'était pas assez chaudement habillé pour une nuit de printemps. Sans plus attendre, je retirais ma veste pour la lui la mettre sur les épaules, souriant alors. "Merci d'être venue. Je sais que mon appel pouvait paraître étrange, il l'était en fait, et ... merci." Je venais de la remercier trois fois en moins de deux minutes, il était maintenant sur et certain qu'elle allait d'avantage s'inquiéter, moi qui n'agissait jamais de tel sorte. Certes, j'avais un comportement de nounours et de grand frère aimant envers la jeune femme, mais jamais à ce point, et jamais après une mini crise de folie passagère. Le temps d'un instant, j'oubliais presque la source du problème. Il suffisait à Mia d'être là, présente pour moi, à mes côtés, et c'était comme si mes soucis s'envolaient, comme si il n'avait jamais existé. Mia avait ce don particulier de pouvoir apaiser mes maux, de pouvoir me rendre heureux par sa simple présence. Je soufflais dès alors, me reposant sur le capot de la voiture, tapotant sur celle-ci pour que la jeune femme y vienne elle aussi. "Je crois que je te dois une explication, hein ?" Question rhétorique, mais je ne savais pas le moins du monde comment introduire un sujet tel que l'alcoolisme, surtout en présence de la femme qui me prenait pour une des meilleures personnes au monde.

C'était étrange, mais la présence de Mia suffisait à me rassurer. Qu'elle soit là, à mes côtés, c'était suffisant pour m'empêcher de me diriger vers le bar et gâcher les derniers mois de sobriété en un instant. Elle était devenue le pilier de ma vie, et je n'avais aucun idée de ce que j'allais faire sans elle, si un jour cette question pouvait se poser. Je savais cependant qu'elle se poserait, la vérité finit toujours par éclater, et un jour ou l'autre, elle m'exploserait à la figure et à celle de Mia, et quand ce moment arrivera, je n'aurais plus rien, plus que mes yeux pour pleurer et ma raison pour me détester. L'air devenait pesante, le lieu oppressant. Je savais que je devais tout dire, maintenant, qu'il était d'ors et déjà trop tard pour reculer, pour choisir un autre chemin. Je me décidais finalement, après quelque secondes, longues, de réflexions, à me tourner vers Mia, plongeant mon regard dans le sien. "Il y a une partie de moi, de ma vie, dont tu ignores tout, et dont j'aurais voulu que tu ne connaisses jamais rien." Soufflais-je alors, baissant un instant le regard pour observer l'obscurité de la nuit qui s'offrait à moi. C'était un sujet difficile à aborder pour moi, et déjà, les remords remontaient en moi. "Je ne t'ai jamais expliqué pourquoi je n'étais plus dans la police. Ce n'est pas qu'un simple congé, j'ai été temporairement viré." Mia devait surement s'imaginer les pires histoires à mon sujet, et elle avait malheureusement bien raison de le faire. Je me retournais, regardant le bar en face de moi. "C'était il y a un an. J'enquêtais sur le kidnapping d'une petite fille, Lucy. Je me rendais compte de la difficulté du métier que j'exerçais, ça avait ses avantages bien sur, mais il y avait des moments, comme ce kidnapping, où j'aurais voulu m'exiler." Et encore, le mot exiler était faible. Il y avait eu une part de moi qui voulait résoudre cette enquête à tout prix, retrouver cette petite fille, coûte que coûte, et une autre part, qui me disait que ce métier était trop difficile, trop dur, que j'étais sensible, et que cela ne me correspondait pas, que je n'étais pas fait pour la police. Peut-être que cette part de moi avait raison. "Elle est morte. Devant mes yeux. Je-je n'ai pas pu la sauver, et chaque jour je pense à ce moment, où je l'ai vu s'écrouler au sol, une balle dans la tête. Il n'y a pas un jour sans que je me dise que j'aurais pu la sauver, que j'aurais du la sauver. Et puis j'ai commencé à boire, comme pour soulager ma conscience meurtrie." Et voilà, c'était dit. Je venais d'avouer à Mia, à la seule personne qui croyait en moi plus que moi-même, que la personne qu'elle cotoyait depuis plusieurs mois n'était qu'un imposteur, qu'un alcoolique, un vaut rien. Je revoyais les images de Lucy, de son visage terrifié, puis ensanglanté. J'empêchais avec une force herculéenne de laisser des larmes tomber. Je ne devais pas me montrer plus faible que je ne l'étais déjà, pas devant Mia. "Je suis alcoolique. Sobre maintenant, mais quand je suis passé devant le Kelly's, c'est comme si toute cette culpabilité que je ressens s'était amplifiée pour me pousser à boire." Je fis une légère pause. J'ouvris alors la bouche, mais pas un son ne sortit. Je réessayais une minute plus tard, me sentant plus mal que jamais. "Pour qui tu dois me prendre maintenant." Et encore, ce n'était pas le pire de l'histoire, mais jamais je n'oserais lui avouer la vérité sur son accident de voiture.

Je me sentais libéré d'un poids, tout simplement. Pas entièrement, car mon alcoolisme et la mort d'une petite fille n'étaient malheureusement pas les seules choses que j'avais sur la confiance, mais en avoir parlé me donnait un sentiment de sécurité plus intense. Mia était toujours là, présente à mes côtés, elle n'était pas partie en courant, honteuse d'être ami avec un homme comme moi. Au contraire, elle me soutenait même. J'eus alors l'étrange impression que notre amitié avait progressé rien qu'en quelques secondes, comme si il avait fallu une lueur de vérité pour que je me sente encore plus en confiance, encore plus heureux auprès d'elle. Même si notre amitié avait été basé sur un énorme mensonge, je savais cependant que tout le reste, que notre lien et notre complicité, étaient des plus réels. Mia était une véritable amie pour moi, même si au fond, j'aurais voulu qu'elle soit bien plus, je me contentais sans problème de ce qu'elle me donnait : son amitié et sa confiance. J'avais passé trois ans à veiller sur elle, à l'aimer chaque jour d'avantage, et elle arrivait pourtant toujours à me surprendre, à me plaire encore plus. A cet instant précis encore plus intensément qu'habituellement, j'aurais voulu qu'il n'y ait pas de mascarade entre nous, pas de mensonge, de jeu. Je n'arrivais cependant pas à regretter d'être rentrée dans sa vie, elle m'avait tant apporté que sans elle, j'auras certainement été un pauvre ivrogne, voire même un cadavre. Elle m'avait apporté la vie, la joie, et l'amour, et c'était les plus belles choses qu'on avait jamais partagé avec moi. "Tu le penses vraiment ? Après tout ce que j'ai fait ..." Loin de moi l'idée de jouer la victime, j'étais seulement étonné que malgré tout, elle puisse rester à mes côtés et continuer à me soutenir et me tendre une main amicale. J'osais alors la regarder dans les yeux. Elle me prit dans ses bras, et sans hésitation je déposais ma tête contre la sienne, fermant un instant les yeux. J'avais le coeur et la conscience beaucoup moins lourds, et cela me faisait un bien fou, de me sentir aimé et accepté malgré mon passé aussi. "Heureusement que tu es là. Je ne te l'ai jamais dit, mais sans toi, je ne serais rien, n'en doute jamais." Je brisais alors à contre coeur notre étreinte. Jetant un dernier coup d'oeil au bar, je me tournais vers Mia, lui adressant mon plus beau sourire. "Et si on partait d'ici ?" Mon envie de boire s'était volatilisée d'un seul coup, ça n'avait jamais été aussi facile de lutter contre mon alcoolisme, de juste tourner ma veste et m'en aller, de comprendre que ma vie était tellement mieux sans addiction. Avec Mia, tout semblait plus facile.

J'attendis la réponse de Mia avant de bouger. Quand celle-ci fut dite, et fut favorable, je souris à nouveau, ouvrant la portière côté passager pour qu'elle s'y installe, avant de claquer la porte derrière elle une fois qu'elle était entrée. Je fis le tour, m'arrêtant un dernier instant pour contempler le panneau du Kelly's clignoter. Je me sentis soudain plus fort, comme si je pouvais lutter contre ça pour un bon bout de temps et même pour toujours. L'alcool faisait partie de mon passé, des malheurs que j'avais vécu, et était la seule solution que j'avais trouvé pour m'en sortir. Aujourd'hui, j'étais un homme différent, qui n'avait pas besoin d'un verre pour se sentir mieux, mais qui avait besoin d'amis, et d'être entouré, et aimé. J'avais désormais compris que c'était beaucoup plus important de se sentir soutenu par une personne, par un ami fidèle, que par une bouteille. Je me sentais idiot, d'avoir succomber si vite à une addiction comme celle-ci, pourtant je ne le regrettais pas. Sans l'alcool, ça aurait été autre chose, la drogue, les médicaments, le sexe, la violence. La seule chose que je regrettais, c'est d'avoir fait du mal aux personnes qui m'entouraient, et d'avoir rejeter celles qui me tendaient la main. J'allais mieux. Je voyais enfin les changements dans ma vie, en moi. Je souris, fier, avant de pénétrer dans la voiture. Allumant le contact de ma jeep, je jetais un coup d'oeil vers Mia. "La plage est magnifique à cette heure-ci, ça te dit ?" Demandais-je, plus serein que jamais. Je commençais alors à rouler, quittant définitivement le parking du Kelly's. C'était un autre souvenir que je préférais laisser derrière moi, qui ne valait même pas la peine que je m'en souvienne. J'étais bien décidé à ne plus passer devant un bar, même si cela était assez difficile aujourd'hui. "J'ai du chocolat dans la boîte à gants, si tu veux." Dis-je alors en pointant du doigt la boîte en question. Quelques minutes plus tard nous étions devant la plage. Je restais un instant assis, le moteur coupé, dans un silence, qui n'était ni pesant, ni fatiguant, mais plutôt bien venu. "C'est surement mon endroit favoris." Lorsqu'il m'arrivait de faire des crises, et d'avoir envie comme pas possible d'une goutte d'alcool, je venais ici, respirer l'air frais, sentir le vent sur ma peau, le sable chaud sous mes orteils, et les vagues essayer de m'attraper. C'était reposant, et j'oubliais bien vite que je voulais boire. Je passais donc pas mal de soirée à me promener ici, seul, mais c'était d'autant plus agréable de le faire à deux.

Je sentis une certaine crispation venant de Mia. Je pouvais voir qu'elle ne trouvait peut-être pas ça autant agréable et reposant que moi, de se retrouver ici, confronté à l'infini de l'océan. Je me sentis alors mal à l'aise de l'avoir entraîné là-dedans, si elle ne se sentait pas l'envie de s'y trouver. Je ne dis pourtant rien. Mia était concentrée sur l'océan, elle marchait tout en fixant l'horizon, perdue dans ses pensées. La plage avait aussi ce don sur moi, de me permettre de réfléchir sur ma vie et sur moi-même, et bien souvent, c'était plus effrayant qu'autre chose. La remise en question, les interrogations sur l'avenir, sur pour quelles raisons est-ce qu'on se levait chaque jour, et quel but on avait dans notre vie. Bien souvent, je n'en avais pas les réponses, et c'était bien ce qu'il me faisait le plus peur. J'étais pourtant intimement persuadé que cela pouvait me faire autant de bien que de mal, et que d'avoir certaines questions et une envie folle de réponses, nous faisait avancer. Je sortis de mes pensées lorsque Mia me parla finalement. Presque surpris, je souris quand elle me deonna son avis sur la paysage qui s'offrit à nous, avant d'accepter un bout de chocolat. J'avais la fâcheuse manie de manger lorsque je n'avais rien d'autre à faire, surtout depuis que j'avais perdu mon travail. Alors que nous marchions tranquilement, Mia retira ses chaussures, releva son pantalon, avant d'avancer vers l'eau doucement, comme si une vague aurait pu venir et l'emporter. Intrigué, je la suivis, imitant alors ses gestes d'il y a quelques secondes. Me dressant derrière elle alors qu'elle s'imobilisait, j'ouvris la bouche dans l'unique peur de faire taire le silence, mais la jeune femme fut plus rapide que moi. Je compris bien vite que l'eau la paralysait. J'avais eu donc raison de croire que quelque chose n'allait pas depuis que nous étions arrivés à la plage. "Ce n'est pas stupide." Je fis un pas en avant, me retrouvant alors aux côtés de Mia, à quelques centimètres seulement des vagues. "Qu'est-ce qu'il s'est passé, pur que tu es peur de la mer ?" J'espérais sincèrement qu'elle se confie à moi, comme je l'avais fait il y a quelques minutes à peine, qui paraissaient pourtant déjà loin. Je n'avais pourtant aucune envie de la forcer, mon ton avait donc été doux et protecteur, pour qu'elle comprenne que si elle ne voualit rien me dire, ce n'était pas grave. Je guettais l'immensité de l'eau qui se trouvait devant moi, essayant de ressentir ce que ressentait Mia, en vain. Après un long moment, je fis un pas en avant, puis deux, avant de me retourner. Je faisais maintenant face à mon amie, et je pouvais sentir l'eau me caressait les molets. C'était une sensation agréable, et j'aurais aimé que Mia voit aussi cela comme ça. Je tendis alors mon bras et ma main, comme une demande. "Tu n'as rien à craindre Mia, je suis là." Mon objectif n'était pas de la jeter à l'eau dans quelques minutes, mais qu'elle sache simplement que j'étais là pour elle, et pour lui venir en aide. Cette soirée était décidément forte en rebondissement, et en émotion. Je ne m'étais jamais imaginé en me levant ce matin, que je partagerais quelque chose d'aussi fort avec ma meilleure amie la soirée-même. Je n'en étais pourtant pas triste, ou même déçu, d'avoir parlé à Mia, bien au contraire. J'étais heureux de savoir que j'avais finalement trouvé une des réponses à mes questions : la raison pour laquelle je me levais chaque jour ? Elle. Toujours elle.

Je me sentais étrangement plus en sécurité ici, plongé dans l'infini de la mer, que nul part ailleurs. Il n'y avait ici aucune tentation interdite, rien qui pouvait me faire chavirer et tomber du mauvais côté. Non. Il n'y avait que l'eau et le sable fin. Il n'y avait que la beauté de l'environnement, le bruit sourd des vagues. C'étais comme si ici, dans cet endroit et det atmoshpère, absolument rien ne pouvait m'être néfaste et me toucher. Je ressentais l'impossibilité d'être malheureux. Sentiment très certainement triplé par la présence de Mia à mes côtés. Sa peur de l'eau aurait pourtant pu gâcher ce moment que je voulais magique et bien différent du début de soirée qui s'avérait être plus tragique. Ce ne fut pourtant pas le cas. Ce moment n'aurait pas plus être plus beau qu'il ne l'était actuellement. J'avais envie qu'elle se dépasse, qu'elle se laisse aller et n'écoute que son coeur. Ce fut pour cette raison que je pris la décision de me mettre dans l'eau, à quelques pas seulement de Mia, mains tendues. Elle aurait pu m'ignorer, me rejeter, me dire non. Sa seule réponse fut de tendre ses bras, et d'emprisonner ses mains dans la douceur des miennes. Sa décision fut de me faire confiance, entièrement, et j'en fus touché. Il y avait cette chose fascinante entre Mia et moi, qui consistait à n'avoir besoin de rien d'autre que de l'autre, pour être heureux. Ce phénomène arrivait souvent, pour ne pas dire tout le temps. Nous étions liés, je le savais, je le sentais. Je n'avais pas besoin d'un confirmation de Mia, car elle me le prouvait chaque jour, à chaque fois qu'elle avait besoin de moi. Je fus surpris lorsque la jeune femme s'approcha dangereusement de moi. Elle se trouvait si proche que je pouvais sentir sa respiration. Mon coeur rata un battement. Etait-ce donc ça, l'amour ? De ne pas être le même avec elle qu'avec quelqu'un d'autre. Mia m'avait bouleversé, tout entier, et je n'avais aucune idée de comment me sortir de cette situation. Je n'avais en réalité aucune idée, de si je voulais véritablement m'en sentir. "Je n'ai aucune raison de rire de toi tu sais." Je souris, la voyant elle aussi, sourire, comme si le seul besoin que j'avais, c'était de la voir heureuse. Elle en avait tellement bavé, et tout cela à par ma faute. A chacun de ses sourires, je me sentais plus apaisé, même si je distinguais bien trop souvent, une lueur de tristesse dans son regard. "Je suis heureux, que tu sois là, avec moi." J'aurais tant voulu en rajouter, lui dire qu'elle était la seule qui faisait battre mon coeur, que j'aurais pu faire n'importe quoi pour qu'elle me pardonne mon erreur, que sans elle, ne je voyais pas de lendemain. Je me tus pourtant. Je n'avais pas besoin d'en dire plus, je ne voulais pas que ce moment soit brisé.

Le temps d'un instant, je me sentais revivre. J'oubliais tout ce qui pouvait me tracasser, laissant mon regard vaguer entre l'eau et Mia. C'était presque magique, qu'en ce moment, tout semblait beau et merveilleux, et que rien d'autre que le bonheur ne pouvait m'atteindre. Il n'y avait qu'elle et moi, et cela suffisait amplement à faire en sorte d'être heureux. Aux côtés de Mia, je me retrouvais toujours totalement épanoui, comme si rien ne pouvait me toucher mis à part elle, au plus profond de mon coeur. Je n'avais jamais désiré dépendre de quelqu'un, avoir besoin d'une autre personne pour me sentir moi-même existé. Je trouvais ça idiot, voire carrément révoltant et faible. Je découvrais pourtant, que ce n'était pas du tout ça, c'était même le contraire. Avoir besoin de Mia à mes côtés, me rendait plus fort, et j'avais besoin de ça, de me croire fort. "De quoi tu parles ?" Lançais-je alors, sur un ton des plus ironique, l'air sur mon visage faussement indigné. Je souris malicieusement, ayant une idée en tête. Alors que la jeune femme avait compris grâce à mon regard que j'allais tenter quelque chose qui ne lui plairait pas des masses, elle recula, vigilante. Sans plus attendre, et juste avant que l'eau ne disparaisse sous ses pas, je tendis mes bras, lui lançant de l'eau. Je m'arrêtais alors, voyant le résultat de mes efforts. J'avais devant moi, une Mia des plus mouillée. Je ricanais, fier de moi, avant qu'elle n'avance et ne me trempe à son tour. Nous étions là, l'air de rien, comme deux enfants, s'amusant, riant, laissant passer le temps. Nous étions bien, tout simplement, et aucun de nous deux ne voulait gâcher cet instant. Une légère brise nous incita pourtant à quitter la mer. Ce n'était décidément pas une excellente idée. Je ne regrettais cependant pas de l'avoir emmené ici, et partagé un instant de douce innocence en sa compagnie. "On devrait rentrer, on risque de tomber malade." Même si cela en valait largement la peine. Je souris, me tournant vers Mia, des étoiles dans les yeux, comme à chaque fois que mon regard croisait le sien. Elle était si belle, si vivante, si souriante. Elle était redevenue la Mia d'avant l'accident, le temps de quelques secondes volées. Elle ne pensait plus au malheur qu'elle avait vécu, mais je savais pourtant que bien vite, elles s'en rappellerait, et que tout ce bonheur ressenti maintenant, n'aurait servi à rien. Cette idée m'attrista, sachant qu'une fois de plus, son malheur était la conséquence de mes erreurs. Une fois de plus, la honte s'empara de moi. Je passais alors mon bras sur son épaule, l'emmenant loin de la mer, loin de l'insouciance, dans un retour à nos misérables vies.