grace, gabriel & juliet

J’ai reçu une invitation y’a quelques mois pour ce truc, tout ce que je sais c’est que j’avais répondu oui pour faire bonne figure, mais j’en avais complètement oublié la signification et la date. Maintenant, je sais pas trop si j’dois vraiment m’y présenter, mais en même temps, c’est pour supporter une bonne cause, j’dois avouer que sans scolarité, je sais pas où j’serais aujourd’hui, du coup, je peux que me dire que ça va aider en quelques sortes. Depuis que j’suis sorti de désintox, j’ai pas encore commis grande action qui font de moi un homme repenti, mais j’tiens quand même à apporter ma contribution. L’endroit où tout ça se déroule est à Chino, Bluebird association je crois, et le truc c’est euh… The AREVA Foundation, jamais entendu parler, peut-être que j’vais faire un tour sur le net avant, pour pas paraître complètement inculte quand j’arrive là-bas. J’ai dit à Julia que j’avais des rendez-vous aujourd’hui, ce qui était le cas, j’devais passer voir John pour savoir ce que j’allais faire de mon poste à la banque, mais finalement, si j’décide de me présenter à l’événement, ça va me bouffer ma journée. De 8h à 18h que c’est écrit sur le feuillet, j’vais y aller vers 10h, comme ça j’aurais le temps de me réveiller complètement et de décider ce que j’vais faire le restant de la soirée après. « Gabe ? Ton rendez-vous avec John, c’est à quelle heure ? » Je me retourne, Julia est habillée d’une serviette, elle vient de sortir de la douche et autant que j’voudrais lui enlever sa serviette et lui faire des trucs pas catholiques, j’dois respecter le fait qu’on soit revenus ensemble y’a pas longtemps et que pour l’instant, on apprend à se redécouvrir. C’est ironique quand même, elle est la mère de ma gosse et enceinte de mon deuxième gosse et j’dois jouer au prude. La vie est parfois parsemée d’embûches qui prennent plaisir à se foutre de notre gueule, grandement en plus. Quand je dis jouer au prude, c’que j’veux vraiment dire c’est que quand Lexie rentre de ses cours, on doit lui allouer toute notre attention, donc les parties jambes en l’air torrides sont hors de question jusqu’à temps qu’elle aille dormir. C’est moi ou c’est difficile de garder ses pattes à soi-même ? L’attirance que j’ressens envers elle a quintuplé, je rigole pas, c’est fou, elle est TOUJOURS désirable, c’est même pas drôle parfois et puis j’suis sûr qu’elle fait exprès… Bref, là n’est pas le point, j’dois me préparer pour aller rencontrer les gens de l’association, j’espère pas avoir un truc trop compliqué à faire, genre de la cuisine, ou de la vente, c’est pas mon truc. Bon ouais la vente, c’est encore drôle, mais la cuisine c’est pas mon fort, j’pense d’ailleurs que Julia va exiger que j’prenne des cours bientôt pour pas que j’l’empoisonne, hehe… « Finalement j’vais aller à l’événement de la fondation et aller voir John un autre jour. Il mourra pas s’il m’attend quelques jours de plus. » J’me défais de mes vêtements pour aller me doucher, faisant carrément exposition de mon corps nu devant ma copine. Elle s’approche de moi et met sa main sur mon torse. Viole-moi, que mon subconscient crie, mais je l’ignore, j’dois jouer au sérieux et me préparer, j’veux pas être trop en retard. « Ouais, mais c’est quand même ta carrière qui est en jeu. » Je soupire, c’est vrai, mais en même temps, j’ai donné beaucoup d’heures et j’ai mis beaucoup de trucs de côté pour travailler à cette banque.  « Pour tout ce que j’ai ramené à John, il va crever s’il me renvoie. J’ai fait la moitié de la clientèle de la banque, et les gens que j’ai ramené c’sont de gros poissons. » C’est le point concluant de la conversation, j’me glisse ensuite sous la douche et vais manger en bas une fois que j’ai terminé.

Il est présentement 9h58 et je sais pas par où entrer, y’a plusieurs portes et j’entends déjà des gens parler en arrière, dans une cour peut-être ? J’sais pas, c’est ça qui arrive quand on va quelque part pour la première fois, on est paumés comme pas deux. Je finis par emprunter une porte et me rends au stand pour demander où je dois me rendre. « Votre nom, monsieur ? » Quand elle lève les yeux pour me regarder, elle me fixe pendant plusieurs secondes, avant de la baisser de nouveau et de regarder dans ses dossiers. « Gabriel Kostas » Dis-je, avec assurance. Je sais pas si c’est mon nouvel air de mec clean qui fait ça, mais j’me fais de plus en plus regarder, c’est trop bizarre, maintenant que tout va bien et que les choses sont mises au clair avec Julia, c’est là que les demoiselles se manifestent. Tant pis pour vous mesdames, je suis pris. « Avec mlle Emerson et mlle Halberstam. La salle au fond, à droite. » Putain non, elle doit faire erreur, je peux pas être avec deux autres femmes ? Rah merde, c’est quoi cette conspiration à la con ? J’espère que ce truc durera pas trop longtemps, j’ai vraiment pas envie de m’éterniser, surtout si j’vais avoir aucune compagnie masculine pour la solidarité. « Et je vais faire quoi, exactement ? » Elle change de page pour voir dans quel événement on m’a inscrit, en plus de m’avoir coincé avec deux gazelles. « Des petits gâteaux. » Je passe ma main dans mon visage en soupirant, ça doit être une sale blague de quelqu’un que je connais pas, parce que vraiment… « Y’a pas moyen de changer ? » Elle hoche négativement la tête. Je la remercie vaguement et me rends à l’endroit en question. Y’a personne pour l’instant, alors j’m’assois sur une des chaises qui se trouve derrière les installations pour cuisiner. Ça promet d’être… riche en action.

Je ne sais pas quelle mouche m’a piqué au moment des inscriptions pour cette œuvre de charité et pourtant je me trouvais là, devant une pauvre hôtesse qui semblait émerveillée par son job minable. « Juliet Emerson. Où dois-je aller ? » Demandais-je d’un air poli qui n’avait pas l’air sincère du tout. La blondasse m’indiqua mon « atelier » ainsi que le nom de mes camarades. Et oui, malheureusement pour moi je n’étais pas seule mais accompagnée. D’une femme et d’un homme dont j’avais déjà oublié les noms et que je ne connaissais absolument pas. J’espérais fortement que le garçon serait mignon, ce qui rendrait les choses un peu moins navrantes. En chemin, je demandais à Barbie en quoi consistait notre boulot et elle m’expliqua avec engouement que nous devions donc faire des pâtisseries et les vendre. J’étais donc là, à devoir faire des gâteaux ? Non mais ce n’était pas franchement une chose qui me plaisait d’autant plus que j’étais une vraie quiche en cuisine. Bref, je remerciais d’un sourire hypocrite l’hôtesse avant de me rendre dans la salle concernée par cette super activité, dans l’espoir de ne pas être la dernière histoire de ne pas trop me faire remarquer. Le jeune homme avec qui j’allais devoir cuisiner se trouvait déjà sur place et semblait tout aussi dépité que moi. Je m’approchais et décidais de me montrer gentille pour le moment, d’autant plus que ce cher garçon était plutôt bien bâti et plutôt charmant. « Et bien je vois que je ne suis pas la seule à me demander ce que je fais là ! » Lançais-je avant de sourire, cette fois d’un sourire très sincère et des plus charmeurs. L’autre fille ne semblait pas encore être arrivée et j’en profitais pour faire une confidence à mon camarade de pâtisserie. « Que les choses soient claires : je déteste la cuisine. » Confiais-je, en gardant ce sourire ravageur aux lèvres. Moi qui avais l’habitude de commander chez un traiteur ou de me nourrir de cochonneries en tout genre, j’étais loin d’être un chef étoilé et la cuisine n’était franchement pas un truc qui me passionnait, bien au contraire.